« Notre fille a 15 ans. Elle a vécu tellement de choses que, parfois, je me demande comment elle tient encore debout. Et pourtant, aujourd’hui, nous sommes totalement perdus. Elle aussi. On veut l’aider, mais on a peur de faire pire. Que faire quand votre enfant demande simplement à être laissé tranquille, alors que tout en vous crie qu’elle doit continuer à avancer ? »
Ce témoignage, aussi sincère qu’émouvant, pourrait parler à de nombreux parents. Il raconte le combat d’une famille face aux troubles de leur fille adolescente, entre santé mentale, pression scolaire, et incompréhensions parentales. Une histoire qui met en lumière un dilemme auquel beaucoup de familles sont confrontées : comment équilibrer l’avenir d’un enfant et son bien-être immédiat ?
Une adolescence marquée par la souffrance
Les premiers signaux sont apparus en sixième. Un âge où les premiers smartphones débarquent dans la vie des enfants. Leur fille, brillante et enjouée, a été victime de harcèlement scolaire. Malgré les tentatives pour alerter l’établissement, les mesures prises n’ont jamais suffi. La famille décide alors de changer de collège.
« On espérait que tout irait mieux, mais en quatrième, elle a développé une phobie scolaire. Chaque matin était une épreuve : elle pleurait, se griffait les bras au point de saigner. Et puis, un jour, elle a craqué complètement. »
Ce n’était pas seulement l’école qui l’effrayait. Un garçon plus âgé, qu’elle fréquentait en secret, exerçait sur elle une emprise psychologique toxique. Cet épisode a laissé des cicatrices profondes, notamment une perte totale de confiance envers les autres. « Même avec moi, son père, elle n’arrive plus à se livrer », avoue-t-il avec douleur.
Un nouveau départ… qui s’écroule
Après un nouveau changement d’établissement, elle réussit à retrouver un semblant d’équilibre. Mais l’entrée au lycée bouleverse tout. Socialement, elle se referme sur elle-même. Elle ne parvient plus à se lier avec ses camarades. Les notes s’effondrent, et l’anxiété reprend de plus belle.
« Juste après Noël, elle n’arrivait plus à sortir de chez nous. Elle s’automutilait à nouveau et nous suppliait de l’aider. Un jour, elle nous a demandé, en larmes, à être hospitalisée. C’était un moment terrible, mais cela nous a permis de prendre conscience de la gravité de la situation. »
Elle passe trois jours à l’hôpital. À sa sortie, le diagnostic est clair : elle n’est pas prête pour retourner au lycée. Commence alors un suivi psychiatrique intensif et des consultations privées pour l’aider à retrouver un équilibre.
Une lueur d’espoir… puis le blocage
Motivée à changer de voie, elle décide de s’orienter vers un apprentissage dans la restauration. Ses parents l’accompagnent dans toutes les démarches. « Elle avait retrouvé une étincelle, un projet qui lui donnait envie de se battre. »
Mais après une première journée d’essai, tout s’effondre. Une altercation avec une collègue la braque complètement. « Quand elle est bloquée, c’est terminé. On a essayé de discuter, de lui expliquer que ça arrive, mais elle n’en pouvait plus. Elle nous disait qu’on la pressait trop et qu’elle n’en pouvait plus de cette pression. »
La discussion vire à la crise. « Ma femme a craqué en plein milieu de la conversation, et je n’arrivais pas à trouver les mots pour ma fille. Moi aussi, je suis perdu. Avec son passif, elle n’a plus confiance en moi, en tant qu’homme. »
Deux visions parentales qui s’entrechoquent
Ce père raconte aussi les tensions avec sa femme. Issue d’une éducation très stricte, elle a du mal à concevoir une année sans scolarité ou activité pour leur fille. « Pour elle, ne rien faire, c’est inadmissible. Elle a grandi en travaillant dès 12 ans à la ferme. Elle ne comprend pas qu’aujourd’hui, on puisse envisager une pause. »
De son côté, il perçoit les choses différemment. « Je veux qu’elle reste vivante. Pour moi, c’est ça l’essentiel. Je me dis que si elle a besoin de temps pour se soigner, alors on doit le lui donner. Mais c’est un point sur lequel on n’arrive pas à s’entendre avec ma femme. »
Une recherche de solutions
Dans leur désarroi, ce père se tourne vers des professionnels pour vider son esprit. « J’ai pris rendez-vous chez une hypnothérapeute. Cela m’avait beaucoup aidé par le passé, alors j’espère que ça pourra m’apporter un peu de clarté. »
Il découvre aussi des alternatives éducatives comme le CNED ou des accompagnements spécialisés pour les jeunes décrocheurs. « Pour moi, l’essentiel est qu’elle ait des options quand elle sera prête. Mais il faut que ce soit son choix. Je veux qu’elle se sente maître de sa vie. »
Un appel à la solidarité
Face à ce combat quotidien, il adresse un appel à d’autres parents. « Est-ce que vous avez été confrontés à ce genre de situation ? Comment avez-vous géré ? Je me rends compte qu’on est tellement nombreux à être perdus, mais on n’en parle pas assez. »
À travers ce témoignage, il espère non seulement trouver du soutien, mais aussi inspirer d’autres familles à persévérer. Car, malgré les épreuves, il reste une certitude : « Je m’accroche au fait qu’elle soit vivante. C’est tout ce qui compte. »